Un sujet macroéconomique : L’accroissement du risque de pauvreté en Allemagne
Un sujet macroéconomique
Selon une étude menée par l’Office fédéral des statistiques (Statistisches Bundesamt) et rendue publique en novembre 2015, 16,7 % des Allemands seraient exposés au risque de pauvreté en 2014, un pourcentage en augmentation de 0,6 points par rapport à 2013 et de 4,5 points par rapport à 2005. C’est plus que la France dont le taux est de 13,3 % en 2014 et en milieu de tableau à l’échelle des pays européens (EU-28) dont la moyenne affiche un taux à 17,2 % en 2014.
Le taux de risque de pauvreté, tel que défini par l'Union européenne, correspond à la proportion de personnes vivant avec un revenu inférieur au seuil de 60 % du revenu médian national après transferts sociaux. Il ne s’agit pas d’un indicateur de richesse ou de pauvreté mais plutôt d´un indicateur du niveau d´inégalités sociales, car il offre un point de comparaison des bas revenus par rapport aux revenus des autres habitants d’un pays donné. En Allemagne, une personne seule avec une rémunération inférieure à 980 euros et un couple avec deux enfants avec une rémunération inférieure à 1 920 euros sont considérés comme menacés par le risque de pauvreté, ce seuil variant selon le niveau de vie et le pouvoir d´achat de chaque pays. Toutefois, quel que soit le pays, tous les indicateurs concordent et désignent les familles monoparentales et les demandeurs d´emplois comme les groupes les plus exposés au risque de pauvreté. En Allemagne, les familles monoparentales représentent ainsi 42 % des individus touchés par le risque de pauvreté et les demandeurs d´emplois en représentent 57,6 %, soit un taux record au sein des pays de l'Union européenne.
Puisque les demandeurs d’emplois sont les plus confrontés au risque de pauvreté, avoir un emploi serait, en principe, un moyen efficace de se prémunir contre une telle situation. Mais la tendance est plutôt à l’apparition de ce que l’on appellerait « le risque de pauvreté laborieuse ». Ainsi, les individus insuffisamment qualifiés exerçant un travail sont de plus en plus nombreux à entrer dans la catégorie des personnes touchées par le risque de pauvreté. De 23 % il y a dix ans, ils sont passés à 31 % en 2014. Ainsi, 2 millions de travailleurs diplômés exercent des mini-jobs en dessous de leur qualification, rémunérés 450 euros par mois, n’ouvrant droit ni à l’assurance sociale, ni à la retraite ni aux allocations chômage.
Enfin, l’économie allemande, sujette au vieillissement de sa population, fait face aujourd’hui à un nombre croissant de retraités confrontés au risque de pauvreté. Ceux-ci représentent en 2014 15,6 % du total des individus touchés par la pauvreté alors qu’ils n’en représentaient que 10,7 % il y a dix ans. Ce taux croissant, déjà alimenté par le passage en retraite du nombre grandissant de travailleurs précaires ou insuffisamment qualifiés, deviendra réellement problématique en 2025, lorsque les chômeurs de longue durée des années 80 et 90 atteindront à leur tour l’âge de la retraite.
L’Allemagne a conscience que des réponses politiques pour affronter les difficultés sociales et du marché du travail et assurer une croissance génératrice d'emplois sont nécessaires afin de réduire le risque de pauvreté et pallier aux inégalités sociales. C’est dans ce contexte que l’Allemagne a mis en place à compter de janvier 2015 un salaire minimum horaire de 8,50 euros et a décidé de revaloriser de 5 % les retraites dès juillet 2016, des mesures dont les effets, sur la paupérisation mais également sur la compétitivité, ne pourront être véritablement jugées que dans plusieurs années.
Sources :
Note du Cerfa 116
- Un nouvel « agenda » pour l’Allemagne ? Comprendre les défis économiques et sociaux (2014-2030) – Comité d’études des relations franco-allemandes – Pierre Zapp
Les Echos
Destatis – Statistisches Bundesamt
Der Tagesspiegel
- „Überqualifiziert“ – 17.11.2015
- „Wenig zum Leben – Rund jeder siebte Deutsche ist armutsgefährdet“ – 28.08.2015
Observatoire des inégalités
Eurostat – Statistics explained
Le Figaro
- Les retraites des Allemands revalorisées de 5 % en 2016 – 30 octobre 2015