Un sujet actuel : L´industrie Allemande et la politique des Etats-Unis

Libre-échange contre retour au protectionnisme. « Former un monde interconnecté » (slogan de la présidence allemande du G 20 qui a débuté le 1er décembre 2016) contre « America First ». Dans ce vieux débat qui a retrouvé de l’actualité suite à l’élection de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis s’affrontent les deux grandes puissances économiques occidentales que sont l’Allemagne et les Etats-Unis.

Les positions opposées d’Angela Merkel et de Donald Trump sur le commerce international, thème primordial pour l’économie allemande exportatrice feront l’objet d’intenses discussions lors des prochains mois et en particulier lors du sommet des chefs d’Etats et de gouvernement du G 20 qui se déroulera à Hambourg les 7 et 8 juillet prochains.

C’est un climat d’inquiétude qui s’est répandu sur l’industrie allemande depuis l’élection de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis et qui s’est confirmé lors des premières semaines de sa présidence. Celui qui avait fustigé le libre-échange et les accords multilatéraux lors de sa campagne électorale a fait de la réduction du déficit commercial extérieur des Etats-Unis un objectif majeur de sa présidence. Il a visé directement la Chine et l’Allemagne leur reprochant d’exercer une concurrence déloyale dans le commerce international. La tension s’est amplifiée en janvier dernier lorsqu’Angela Merkel a dû répondre à une attaque d’un proche conseiller de M. Trump, Peter Navarro qui avait accusé l’Allemagne d’exploiter ses partenaires grâce à un euro « grossièrement dévalué ».

Toujours en janvier, la chancelière avait appelé les entreprises allemandes à la soutenir dans la lutte contre le protectionnisme, redoutant que celles-ci ne cèdent aux « chantages » de Donald Trump. Ce dernier avait notamment menacé BMW de lui imposer des droits de douane de 35% si le projet de construction d´une usine au Mexique était mené à bien. Bayer a pour sa part été soupçonné de céder au chantage de Donald Trump, suite à un tweet de celuici : « Bayer AG a promis des emplois et des investissements nouveaux aux Etats-Unis après avoir rencontré le président élu, Donald Trump, un de plus sur la liste… ». L’industrie automobile allemande, dont les exportations sur le marché américain ont représenté 34 milliards d’euros en 2015, aurait particulièrement à perdre en cas de durcissement des règles de libre-échange visant à limiter les importations américaines.

C’est dans ce contexte de refroidissement transatlantique qu´a eu lieu le très attendu premier face-à-face entre Donald Trump et Angela Merkel lors de la visite officielle de la chancelière allemande à la Maison-Blanche le 17 mars. A l´issue de la rencontre, aucune déclaration majeure n´est ressortie de la conférence de presse. Le président américain s’est défendu de ne pas être un isolationniste mais un partisan du libre-échange, tout en soulignant l’importance du caractère équitable du commerce international et les effets négatifs du libre-échange sur la dette et le déficit américain dans le passé. La chancelière allemande a rappelé sans surprise son attachement à la mondialisation et à la poursuite des négociations commerciales entre l’Union européenne et les Etats-Unis.

Parallèlement, les 17 et 18 mars, une première rencontre des ministres des finances du G 20 a eu lieu à Baden-Baden sous présidence allemande en présence du nouveau secrétaire américain au Trésor, Steven Mnuchin. Cette rencontre, loin d’apaiser les craintes des dirigeants européens, a donné lieu à d’âpres négociations et s’est achevée par une rupture significative dans le communiqué final de la rencontre. Les Etats-Unis se sont opposés à la formulation répétée depuis 2005 d’engagement solennel des membres du G20 « à lutter contre toutes les formes de protectionnisme ». Steven Mnuchin a confirmé la position de Donald Trump de donner plus d’importance au bilatéralisme dans le commerce international quitte à contredire les principes de l’OMC, qui seront selon lui au besoin renégociés.

Les commentateurs européens ne peuvent qu’espérer un assouplissement de la position des Etats-Unis d’ici le sommet des chefs d’Etat et de gouvernement de juillet prochain. Entretemps une grande réforme fiscale est en cours de préparation à Washington. Celle-ci pourrait concrétiser le projet d’une taxe aux frontières qui pénaliserait les groupes exportant aux Etats- Unis. La réouverture du débat libre-échange-protectionnisme pourrait ainsi rapidement prendre des contours concrets.

Auteur

Elodie Villeneuve

Sources:

  • « Le G20 sous le choc après le blocage des Etats-Unis sur le libre-échange » Les Echos, 19.03.17
  • « Donald Trump à Angela Merkel : « Je ne suis pas un isolationniste » », Le Monde, 17.03.17
  • « Le G20 attend des engagements de Washington en faveur du multilatéralisme », Le Monde économie, 17.03.17
  • « Donald Trump inquiète les industriels allemands » Le Point Economie, 04.02.17
  • « Merkel prône l’unité de l’industrie allemande face à Trump », Les Echos, 19.01.17