Newsletter Paie & Sociale numéro 10

Juillet 2024 | Chaque mois, la Newsletter Paie & Sociale reprend les points essentiels de l’actualité en matière de droit social et de paye qui impactent la vie de votre entreprise et l’environnement économique dans lequel nous évoluons.

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Actualité Paie

Quid des ZRR après la mise en place des ZFRR

Communiqué BOSS du 1-7-2024

Pour rappel, la loi de finances pour 2024 a prévu de remplacer les dispositifs des zones de revitalisation rurale (ZRR) et des zones de revitalisation des commerces en milieu rural (ZoRCoMiR), arrivant à échéance le 31 décembre 2023, par un zonage unique simplifié dénommé « France ruralités revitalisation » (ZFRR).

Ce nouveau zonage, est entré en vigueur le 1er juillet 2024, il est décliné en deux niveaux : un niveau socle (ZFRR) et un niveau renforcé (ZFRR « + ») ouvrant droit à des avantages fiscaux différenciés.

Toutefois certaines communes classées en ZRR jusqu’au 30 juin 2024 n'ont pas été reprises dans le classement ZFRR et ne devaient, par conséquent, plus bénéficier des avantages spécifiques à ces zones à partir du 1er juillet 2024.

Le premier ministre Gabriel Attal a déclaré à l’Assemblée nationale, lors de questions au Gouvernement, que les communes en ZRR non reclassées en ZFRR continueraient à bénéficier des exonérations fiscales et sociales spécifiques à ces zones. 

Cette prolongation, à compter du 1er juillet 2024 du zonage ZRR pour les communes sortantes du dispositif et non incluses dans le périmètre des ZFRR, est aujourd’hui insérée dans le BOSS, celui-ci précisant que les communes listées par l’arrêté TREB2416551A du 19 juin 2024 continuent à bénéficier du même régime social favorable. 

A noter :

Les entreprises implantées en ZFRR ou ZRR, bénéficient, sous certaines conditions, d’une exonération de cotisations patronales d’assurances sociales et d’allocations familiales pour l’embauche du premier au 50e salarié.

Le gouvernement suspend la réforme de l’assurance chômage

Décret 2024-648 du 30 juin 2024, JO du 1 er juillet

La réforme de l'assurance chômage était une réforme phare du gouvernement, qui avait pour objectif de durcir les conditions d’accès à l’assurance chômage et à réduire la durée maximale d'indemnisation, avec une entrée en vigueur programmée le 1er décembre 2024. Le décret final aurait dû en principe paraître pour le 1er juillet 2024.

A la vue des résultats des élections législatives, le gouvernement a décidé de temporiser et de mettre en pause sa réforme. A ce titre, un décret a été publié au Journal officiel du 1er juillet 2024 pour prolonger jusqu’au 31 juillet 2024 les règles actuelles d’assurance chômage fixées par le décret modifié du 26 juillet 2019, et qui arrivaient à échéance le 30 juin. Pour le gouvernement, il s’agit pour le moment de suspendre la réforme, et non de l’abandonner. Selon Matignon, "cette réforme pourra faire l’objet d’aménagements, de discussions entre forces républicaines".

Partage de la valeur : les principaux apports des décrets de juin et juillet derniers

Décret n° 2024-644, 29 juin 2024, article 2 : JO du 30 juin

Décret n° 2024-690, 5 juill. 2024 : JO, 6 juillet

1)    En matière d’intéressement et de participation

La loi Partage de la valeur du 29 novembre 2023 permet aux accords d'intéressement ou de participation de prévoir le versement, en cours d'exercice, d'avances sur les sommes dues au titre de ces dispositifs. Dans cette hypothèse, ces avances ne peuvent être versées aux bénéficiaires qu’après avoir recueilli l’accord de ces derniers. Le décret du 29 juin 2024 précise les modalités d’information des salariés et de recueil de leur accord avant le versement de telles avances.

Ainsi, dans ce cadre, l’employeur doit informer chaque salarié de la possibilité de bénéficier d’une telle avance, et du délai dont il dispose pour donner son accord. A défaut de précision sur le délai de réponse au sein de l’accord d’intéressement ou de participation, le salarié aura 15 jours pour effectuer sa demande à compter de la réception de l’information réalisée par l’employeur. A défaut d’accord exprès du salarié, aucune avance ne sera effectuée à l’intéressé.

La somme attribuée au titre de l’avance devra faire l’objet d’une fiche d’information distincte du bulletin de salaire, mentionnant un certain nombre d’informations (cf article D.3348-2 du code du travail), comme le montant des droits attribués au titre de l’avance, l’obligation et les modalités de reversement par le bénéficiaire en cas de trop perçu, l’accord du bénéficiaire, etc.

Autre précision du décret : les absences pour congé de congé paternité et d’accueil de l’enfant sont assimilées à des périodes de présence lors de la répartition de la participation ou de l’intéressement.

2)    En matière d’épargne salariale

Ce même décret permet désormais aux salariés de placer leur prime de partage de la valeur (PPV) sur un plan d’épargne salariale ou un plan d’épargne retraite, et de bénéficier ainsi de l’exonération fiscale s’y rattachant, voire d’un abondement. Le salarié souhaitant placer sa PPV en tout ou en partie sur un tel plan doit en faire la demande dans un délai de 15 jours à compter de la réception du document l’informant du montant attribué, et dont il peut solliciter le versement.

L’employeur doté de l’un de ces plans doit remettre aux salariés une fiche d’information, pour chaque somme versée au titre de la PPV, distincte de son bulletin de paie et comportant diverses mentions prévues par l’article 1 II du décret telles que le montant de la PPV attribuée, la possibilité de son affectation sur un plan d’épargne, le délai de la demande, …

Le décret du 5 juillet 2024 quant à lui prévoit 3 nouveaux cas de déblocage anticipé pour la participation. Par renvoi, ils concernent également les plans d’épargne entreprise (PEE), mais pas les plans d’épargne retraite. Ces 3 nouveaux cas de déblocage sont les suivants :

  • Dépenses affectées à la rénovation énergétique des résidences principales : ce cas est applicable aux faits générateurs (dépenses ou achat) postérieurs à l’entrée en vigueur du décret (7 juillet 2024) ;
  • Activité de proche aidant exercée par l’intéressé, son conjoint ou partenaire pacsé auprès d’un proche au sens retenu pour le congé de proche aidant (article R3324-22 code du travail). Ce cas s’applique aux demandes présentées après l’entrée en vigueur du décret (7 juillet 2024) ; en d’autres termes, la situation de proche aidant peut avoir débuté avant l’entrée en vigueur du décret ;
  • Acquisition d’un véhicule dit propre :
    • Soit utilisant l’électricité, l’hydrogène ou les 2, s’il s’agit :
      • D’un véhicule conçu et construit pour le transport de personnes et comportant, outre le siège du conducteur, huit places assises au maximum (véhicule appartenant à la catégorie M1 au sens de l’article R. 311-1 du code de la route) ;
      • D’une camionnette ;
      • Ou d’un véhicule à moteurs à 2 ou 3 roues et quadricycles à moteur ;
    • Soit un cycle à pédalage assisté, neuf.

Ce cas est lui aussi applicable aux faits générateurs (dépenses ou achat) postérieurs à l’entrée en vigueur du décret (7 juillet 2024).

Ce même décret prévoit par ailleurs une augmentation du plafond des abondements de l’employeur au PEE, en cas de versement unilatéral de l’employeur, en vue de l’acquisition d’actions de l’entreprise : jusqu’à présent limité pour chaque bénéficiaire à 8% du PASS, ce plafond est désormais porté à 16% du PASS. 

3)    Concernant le nouveau plan de partage de la valorisation de l’entreprise

La loi Partage de la valeur a institué un nouveau dispositif facultatif, le plan de partage de la valorisation de l’entreprise (PPVE), pouvant être utilisé par toute entreprise. Il permet le versement aux salariés d’une prime de partage de valorisation de l’entreprise lorsque la valeur de cette dernière augmente sur une période de 3 ans. Cette prime bénéficie d’un régime social de faveur (exonérations des cotisations sociales pour 2026, 2027 et 2028, excepté de CSG/CRDS), et d’une exonération d’impôt sur le revenu pour le salarié l’ayant placé sur un plan d’épargne.

Ce PPVE, mis en place par accord collectif, sur rapport spécial d’un commissaire aux comptes de l’entreprise, doit être déposé, ainsi que ses annexes, de façon dématérialisée sur la plateforme « TéléAccords ». Il fait ensuite l’objet d’un contrôle URSSAF (CGSS ou CMSA), qui dispose d’un délai de contrôle de 3 mois avant que les exonérations sociales soient réputées acquises.

Le décret prévoit l’obligation pour l’employeur de remettre une fiche d’information aux salariés, distincte du bulletin de paie, après le dépôt du PPVE, afin d’y mentionner le montant de référence attribué à chacun au titre de la prime de partage de valorisation de l’entreprise, ainsi que le critère de modulation éventuellement appliqué (rémunération, classification ou durée du travail). Cette prime peut ensuite être placée sur un plan d’épargne, à la demande du salarié (délai de 15 jours à compter de la réception de l’information du montant attribué), et bénéficie ainsi d’une exonération d’impôt sur le revenu, dans la limite, par an de 5 % des ¾ du PASS.

4)    En matière de calcul de seuils d’effectifs

  • Calcul du seuil de moins de 50 salariés pour le droit au régime renforcé d’exonération pour la prime de partage de la valeur : la loi Partage de la valeur a prévu le maintien du régime renforcé d'exonération fiscale de la PPV dans les entreprises de moins de 50 salariés pour une période de 3 ans, du 1er janvier 2024 au 31 décembre 2026, pour les salariés ayant perçu une rémunération inférieure à 3 SMIC annuels au cours des 12 mois précédents leur versement, et dans la limite, selon le cas, de 3 000 € ou 6 000 € par an ;
  • Calcul du seuil d’au moins 11 salariés pour le partage obligatoire de la valeur dans les entreprises d’au moins 11 salariés non tenues de mettre en place la participation et réalisant un bénéfice net fiscal au moins égal à 1 % du chiffre d’affaires pendant 3 exercices consécutifs et qui ne sont pas tenues de mettre en place la participation ;
  • Calcul du seuil de 11 salariés et plus pour le partage obligatoire de la valeur dans les associations, fondations, coopératives et mutuelles en cas de résultat excédentaire :

Le décret du 5 juillet 2024 précise que les seuils d'effectif susmentionnés, se calculent suivant les règles d’effectif « sécurité sociale » - à savoir un effectif apprécié au niveau de l’entreprise sur l'année civile précédente, tous établissements confondus - mais exclut l’application du moratoire de 5 ans en cas de franchissement à la hausse du seuil d’effectif. Ainsi, une entreprise de moins de 50 salariés qui viendrait à franchir le seuil de 50 salariés se verra immédiatement privée du régime renforcé d’exonération, sans pouvoir bénéficier du moratoire de 5 ans.

Actualité Sociale

Le salarié peut refuser un poste à temps partiel malgré les préconisations du médecin du travail

Cass. soc. 19-6-2024 n° 22-23.143

Dans cet arrêt, une salariée victime d’un accident du travail a été déclarée apte à reprendre son poste par le médecin du travail.  Ce dernier préconisait une reprise à temps partiel avec un port de charge limité.

L’employeur est tenu de prendre en compte les réserves et recommandations du médecin du travail, afin de respecter son obligation de sécurité.

Il propose donc à la salariée un poste à temps partiel le 16 janvier 2020, qu’elle refuse. Elle ne reprend pas son travail et signe une rupture conventionnelle avec son employeur avec une fin de contrat en juillet 2020. De janvier à juillet 2020, elle n’est pas rémunérée. Elle sollicite donc le rappel de salaire à temps plein sur cette période.

La Cour d’appel lui accorde le rappel de salaire pour la période du 9 au 16 janvier 2020 uniquement, car la salariée n’a pas fourni de travail effectif par la suite. Elle se pourvoit donc en cassation

La Cour de cassation donne raison à la salariée.  La proposition d’un poste à temps partiel constituait une modification de son contrat de travail qui nécessitait son accord. Elle était donc en droit de refuser. L’employeur ne pouvait lui imposer cette modification et procéder en conséquence à la diminution de son salaire sans son accord.

La salariée était donc fondée à refuser le passage à temps partiel malgré les préconisations du médecin du travail car cela constitue une modification de son contrat de travail.

La durée de la période d’essai en cas de CDD se poursuivant en CDI

Cass. soc. 19-6-2024 no 23-10.783 

L’arrêt du 19 juin 2024 rappelle les règles relatives à la durée de la période d’essai en cas d’un ou plusieurs contrats à durée déterminée (CDD) se poursuivant en contrat à durée indéterminé (CDI) sur un même emploi.

Dans ce cas, la durée du ou des CDD est déduite de la période d’essai prévue dans le CDI, même si les CDD ont été espacés par de courtes périodes.

Convention collective SYNTEC : extension de l’avenant du 13 novembre 2022

Arrêté du 12 juin 2024 portant extension de l’avenant du 13 novembre 2022

Un arrêté du 12 juin 2024 a porté extension de l’avenant du 13 novembre 2022. Les dispositions de l’avenant sont donc désormais applicables à compter du 1er juillet 2024 à l’ensemble des entreprises entrant dans le champ d’application de la convention collective SYNTEC. Cet avenant modifie les dispositions relatives aux conventions de forfait jours. Il permet notamment de conclure des conventions de forfait jours avec des salariés ayant une classification Cadre, position 2.3.  Pour les salariés en forfait jours relevant de cette qualification, la rémunération annuelle doit être au moins égale à 122 % du minimum conventionnel de sa catégorie sur la base d'un forfait annuel de 218 jours travaillés ou sur la base du forfait défini en entreprise.

Par ailleurs, l’employeur est désormais tenu de réaliser un entretien individuel par an minimum, au lieu de deux auparavant.

L’avenant porte modification également des dispositions sur le temps de repos et de la charge de travail relatif au forfait jours.

A noter que cet avenant crée un nouveau chapitre sur le droit et l’obligation de déconnexion. Il établit l’obligation pour l’employeur d’adopter les mesures nécessaires et de les communiquer par tout moyen aux salariés, la possibilité de créer une procédure d’alerte en cas d’utilisation récurrente des outils numériques pendant les temps de repos, l’obligation pour les entreprises de plus de 250 salariés de nommer un référent à la déconnexion. Ce référent a pour rôle de sensibiliser les collaborateurs et manageurs aux enjeux de la déconnexion et de diffuser les bonnes pratiques de la connexion responsable. Lorsque la procédure d’alerte mentionnée auparavant est mise en place dans l’entreprise, le référent doit y être intégré.

Rupture conventionnelle et demande d'homologation

 Cass. soc., 19 juin 2024, n°22-23.143

La rupture conventionnelle individuelle conclue entre un salarié et son employeur, doit obligatoirement être "homologuée" (c'est-à-dire vérifiée et validée) par l'Administration (la DREETS) pour que la rupture du contrat de travail puisse avoir lieu.

C'est en effet lorsque le document Cerfa est dûment rempli et signé, le délai de rétractation de 15 jours terminé, que le Code du travail prévoit que "la partie la plus diligente" (très souvent l'employeur) transmet le document à la DREETS via la plateforme en ligne TéléRc. L'Administration dispose alors d'un délai de 15 jours ouvrables à compter de la réception de la demande pour contrôler que chaque étape de la procédure (consentement mutuel des parties, respect des différents délais etc.), ainsi que le montant minimum de l'indemnité légale/conventionnelle qui sera versée au salarié à l'occasion de la rupture, ont bien été respectés.

Si l'Administration juge que la procédure n'a pas été respectée pour quelque motif que ce soit, elle déclare alors la demande de rupture conventionnelle "irrecevable".

Que faire dans cette situation ? Recommencer une demande et par la même occasion retarder la rupture du contrat de travail ? Corriger le document Cerfa manuellement selon les indications de la DREETS et rompre le contrat de travail ? Passer outre les indications de l'Administration et rompre le contrat de travail à la date initialement prévue ?

La Cour de cassation est venue apporter des précisions dans un arrêt du 19 juin 2024 (Cass. soc., 19 juin, n°22-23.143).  Les juges ont estimé que lorsque la demande d'homologation est déclarée irrecevable par l'autorité administrative, en raison d'erreurs sur le document Cerfa (ici, les salaires à prendre en compte pour le calcul de l'indemnité), mais que l'employeur a pu fournir des explications convaincantes auprès de l'administration, celui-ci n'a pas à recommencer la procédure de rupture conventionnelle depuis le début et par conséquent, à signer un nouveau document Cerfa.

Notez toutefois que l'homologation est laissée à la libre appréciation de l'autorité administrative compétente ; qu'en l'espèce, les explications fournies par l'employeur avaient permis de démontrer qu'il n'y avait aucune erreur sur les salaires pris en compte pour le montant de l'indemnité de rupture, et que pour cette raison seule, l'administration était revenue sur l'irrecevabilité de la demande.

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