Un sujet actuel : Berlin, un climat favorable à l’innovation

Tout d’abord, qu’est-ce qu’une start-up ? Si ce mot est connu de tous, en donner une définition précise reste complexe. Dans cet article, nous définirons la start-up comme une structure ayant moins de 5 ans et étant basée sur un modèle économique évolutif, pour lequel internet est indispensable. Selon le site allemand Gründerszene.de, il y avait environ 620 entreprises qui remplissaient ces critères à Berlin en 2015. Cela représentait environ 13.200 emplois.

En Allemagne, Berlin est la capitale de la création d’entreprises. Comme le révèle le journal allemand Der Tagesspiegel dans son article « Wie Berlin die Gründer-Szene dominiert » (comment Berlin domine le secteur de la création d’entreprises), 17% de toutes les start-ups allemandes sont localisées à Berlin. Cela peut sembler peu, mais les start-ups berlinoises fournissent en réalité 42% des emplois créés par les start-ups allemandes.

La domination de Berlin en Allemagne ne se remarque pas seulement à la taille des start-ups, mais aussi à leurs modes de financement. Selon le Tagesspiegel, une start-up berlinoise sur trois a déjà reçu un financement provenant du capitalrisque. A l’échelle nationale, ce n’est même pas la moitié. Parmi les fleurons berlinois, on peut citer Zalando ou SoundCloud (service utilisé pour partager des morceaux de musiques produits soi-même, dont le nombre d’utilisateurs dépasse 200 millions par mois).

Mais pourquoi Berlin est-elle la capitale des start-ups ? Comment Berlin aide ses entrepreneurs ?

Le site Gründerszene.de rapporte que Florian Nöll, le président de l’association fédérale des start-ups allemandes (« Bundesverband Deutsche Startups »), reproche aux politiques berlinois d’ignorer les start-ups. Pourtant, on peut noter des initiatives telles que « Berlin Partner für Wirtschaft und Technologie GmbH », une société de promotion économique et technologique pour les entreprises et les investisseurs à Berlin. « Start Alliance » est l’un des programmes soutenus par Berlin Partner. Il permet à des start-ups d’explorer gratuitement l’univers d’une des villes participantes : Berlin, Londres, Paris, Shanghai, … Une start-up berlinoise envisageant de s’étendre géographiquement pourrait ainsi apprendre à connaitre les spécificités du marché français, ses potentiels obstacles, son contexte légal. C’est également une belle opportunité de networking.

Berlin peut également être fier de ses incubateurs. L’Allemagne regorge de grandes entreprises qui ont compris qu’elles manquaient de créativité et d’innovation. Elles espèrent résoudre ce problème en investissant dans des start-ups et en leur apportant un soutien. Par exemple, l’incubateur Hub:raum a été créé par Deutsche Telekom en 2012 et a déjà investi dans 22 start-ups.

Berlin dispose aussi de « company builders », ce qui est encore rare à Paris ou à Londres. Les « company builders » accompagnent la start-up à travers toutes les étapes de son développement, éventuellement jusqu’à son déclin. Ils se différencient donc des incubateurs, qui fournissent à la start-up un environnement favorable au développement d’une idée entrepreneuriale. Les incubateurs interviennent donc uniquement au début de la vie d’une start-up. A Berlin, le « company builder » le plus connu s’appelle « Rocket Internet ». Chez Rocket, on prend des idées qui ont déjà fait leurs preuves, on les optimise et on les exporte dans des pays qui n’ont pas encore bénéficié de ces idées. Zalando a par exemple été construit sur le modèle de Zappos, un site américain de chaussures et de vêtements détenu par Amazon.

Enfin, le coût de la vie à Berlin est un avantage indéniable, surtout en comparaison avec ses concurrents européens. Les loyers y sont bien plus abordables qu’à Londres ou à Paris, ce qui n’est pas négligeable lorsque l’on monte un business. De plus, Berlin est une ville cosmopolite, dans laquelle l’anglais est parlé partout.

La France ou le Royaume-Uni peuvent-ils contester la position dominante de Berlin en Europe pour la création d´entreprises ?

La mairie de Paris a fait de véritables efforts depuis une dizaine d’années, avec notamment le développement d’incubateurs et d’accélérateurs. Grace au financement de Xavier Niel, le fondateur du groupe de télécoms Free (Iliad), Paris abrite depuis 2017 le plus gros incubateur au monde : « Station F ». L’endroit est immense, puisqu’il dispose de plus de 3 000 postes de travail, d’espaces de réunion, de cuisines, d’un restaurant et d’un auditorium de 370 places. Si l’objectif premier est d’appuyer l’écosystème français, Xavier Niel ne cache pas une ambition internationale pour Station F, avec l’espoir que d’autres nationalités viendront y créer leur startup. Paris a aussi lancé le programme « Paris Code » pour former un millier de nouveaux programmeurs chaque année, car les entreprises de tech sont très demandeuses.

L’« effet Macron » (et sa start-up nation) contribuent aussi à rendre la France attractive pour les jeunes pousses de la tech. Le président a en effet réformé l’ISF et introduit une taxation forfaitaire à hauteur de 30% sur les revenus et plus-values, rendant ainsi la France fiscalement plus attractive pour les investisseurs. Il n’existe actuellement pas d’équivalent en Allemagne à ce régime de faveur instauré en France c’est-à-dire une taxation forfaitaire de 30% des résultats et plus-value de sortie.

Quant à Londres, la « City » dispose d’un avantage indéniable, puisqu’elle est encore la capitale de la finance européenne, et ce malgré le Brexit. Or, les « venture capitalists » (investisseurs en capital-risque) préfèrent rester géographiquement proches de leurs protégés. En termes d’investissements, Londres devance Berlin (963 millions de livres) et Paris (797 millions de livres) avec 1,8 milliards d’investissements en 2018. En réalité, Londres, Berlin et Paris se battent pour la première place, et les classements changent régulièrement en fonction de l’année et de l’indicateur.

Auteur

Caroline Mizon